Comment modifier la résidence alternée ? Stratégies et solutions
La garde alternée, ou résidence alternée, est une modalité d'exercice de l'autorité parentale qui permet à l'enfant de vivre de manière équitable chez chacun de ses parents après une séparation ou un divorce. Si elle repose sur un principe de partage des responsabilités et des moments de vie de l'enfant, il arrive que cette organisation ne soit plus adaptée au fil du temps. Dans cet article, nous aborderons les voies juridiques permettant de remettre en cause une garde alternée, ainsi que les critères et les stratégies à adopter pour assurer le meilleur intérêt de l'enfant.
1. Les fondements juridiques de la garde alternée
La garde alternée est inscrite dans le Code civil, notamment à l’article 373-2-9, qui énonce que la résidence de l'enfant peut être fixée en alternance chez chacun des parents ou chez l'un d'eux. Elle repose sur le principe de la préservation de l'intérêt supérieur de l'enfant, conformément à l'article 373-2-6 du Code civil, lequel précise que les décisions concernant la garde doivent avant tout viser cet objectif.
Cependant, une telle organisation n’est pas toujours idéale à long terme. Les parents, ou parfois même l'enfant, peuvent demander une modification de cette modalité, soit pour la supprimer, l’adapter ou encore la remplacer par une garde exclusive.
2. Les critères permettant de remettre en cause la résidence alternée
Pour obtenir une modification de la résidence alternée, le demandeur (parent ou enfant représenté par son tuteur) doit apporter des éléments prouvant que les conditions initiales de la garde alternée ne sont plus réunies. Il est impératif de se concentrer sur les besoins de l’enfant et non sur les désaccords entre les parents.
A. Le changement des circonstances :
L'article 373-2-11 du Code civil autorise la révision des modalités de garde lorsqu'un changement significatif des circonstances survient.
Il peut s’agir par exemple :
D’un déménagement important de l'un des parents, qui rendrait impossible la gestion pratique de la garde alternée (temps de trajet, fatigues pour l’enfant, école lointaine, etc.).
D’un changement dans la situation professionnelle d’un des parents, rendant difficile la prise en charge régulière de l’enfant (horaires de travail incompatibles avec la garde).
De difficultés scolaires ou comportementales manifestées par l'enfant, pouvant montrer que l’alternance entre deux foyers ne lui permet pas de s’épanouir correctement.
D’un non-respect chronique et démontré de l’autorité parentale qui se traduit notamment par des prises de décisions importantes ( scolarité, médicales’ religieuses) sans l’accord de l’autre parent.
B. Le souhait de l'enfant :
Selon l’article 388-1 du Code civil, l’enfant capable de discernement (en général autour de 10 ans) peut être entendu par le juge aux affaires familiales (JAF). Si l'enfant, dans le cadre de son droit à l’expression, exprime une préférence pour une garde chez un seul parent, cette volonté, sans être décisive, sera un critère pris en compte par le juge. Il est néanmoins important de souligner que le juge n’est nullement tenu par la parole de l’enfant.
C. Le conflit parental :
Si la garde alternée engendre des tensions excessives entre les parents, ou si la communication entre eux est tellement dégradée qu’elle nuit à l'enfant, cela peut justifier une modification de la garde. Le JAF, dans l'intérêt de l'enfant, pourra décider de rétablir une garde exclusive chez un seul des parents.
3. La procédure pour remettre en cause la garde alternée
Le parent qui souhaite modifier la garde alternée doit saisir le juge aux affaires familiales en déposant une requête auprès du tribunal judiciaire compétent, en application de l'article 373-2-13 du Code civil.
Les étapes à suivre :
A. Constituer un dossier solide :
Il est essentiel de bien préparer son dossier, car le juge se prononce en fonction des éléments de preuve fournis qui reposent essentiellement sur l’intérêt de l’enfant.
Cela peut inclure :
Des certificats médicaux ou psychologiques démontrant l’impact négatif de la garde alternée sur la santé ou le bien-être de l’enfant.
Des bulletins scolaires attestant des difficultés de concentration ou de comportement.
Des attestations de tiers (enseignants, éducateurs, proches) pour renforcer la crédibilité de la demande.
B. Être assisté par un avocat :
L'accompagnement par un avocat est vivement recommandé, surtout pour la rédaction de la requête et la constitution des pièces. Un avocat en droit de la famille saura guider les parents dans cette démarche en veillant à protéger au mieux les intérêts de l’enfant.
C. Audience devant le juge aux affaires familiales :
Le JAF convoquera les deux parents à une audience où ils seront invités à exposer leurs arguments. Le juge prendra sa décision en tenant compte des besoins de l’enfant, des circonstances nouvelles, et du comportement des parents.
4. Stratégies pour maximiser vos chances
A. Privilégier le dialogue et la médiation :
Avant de saisir le juge, il est souvent recommandé de tenter une médiation familiale. L’article 373-2-10 du Code civil encourage les parents à se tourner vers cette voie pour résoudre à l’amiable leurs différends. Non seulement cela montre au juge que vous avez tout fait pour trouver une solution à l’amiable, mais cela peut aussi aider à préserver un climat familial apaisé.
B. Se concentrer sur l'intérêt de l'enfant :
Toute demande visant à remettre en cause la garde alternée doit démontrer que l’intérêt de l’enfant est prioritaire est en cause. Évitez de fonder vos arguments sur vos propres désirs ou frustrations. Montrez plutôt en quoi la situation actuelle n’est pas bénéfique pour l’épanouissement de l’enfant.
C. Anticiper les contre-arguments :
Lorsqu’on demande une modification de la garde, il est probable que l’autre parent s’y oppose. Anticipez ses contre-arguments et préparez des réponses précises, documentées et axées sur des faits tangibles.
5. Exemples concrets
Exemple 1 : Le cas d’un déménagement à 200 km.
Madame X déménage à 200 km pour des raisons professionnelles. Monsieur Y refuse de remettre en cause la garde alternée. Madame X peut faire valoir que ce déménagement rend la garde alternée impraticable pour l’enfant, qui passerait trop de temps en trajet et ne pourrait plus suivre correctement ses cours. Néanmoins dans ce cas le père est également en mesure de solliciter la garde exclusive, il est vivement conseillé de toujours évaluer sérieusement les risques de ce type de demande.
Madame X, dans ce dossier a obtenu la garde exclusive de son fils et a donc été autorisée par le juge à déménager, elle avait préparé un projet parental très argumenté et sérieux qui reposait sur l'environnement dont bénéficierait l'enfant à la fois sur le plan de son logement mais également sur le plan scolaire et social.
Exemple 2 : L'enfant exprime son mal-être. L’enfant Z, âgé de 14 ans, exprime à son psychologue des difficultés à vivre entre deux maisons. Il fait des crises d'angoisse à chaque changement de résidence. Monsieur et Madame X sont convoqués devant le JAF, qui prendra en compte l'expertise psychologique et les souhaits de l’enfant pour fixer une nouvelle garde.
Remettre en cause une garde alternée nécessite une approche réfléchie et bien préparée. Le juge aux affaires familiales se prononce toujours en faveur de l’intérêt supérieur de l’enfant, ce qui doit être l’axe central de toute démarche. Il est essentiel de constituer un dossier solide, d’anticiper les réactions de l’autre parent et d’être bien accompagné juridiquement pour maximiser les chances de succès.
Si vous souhaitez être accompagné dans cette démarche, n’hésitez pas à contacter notre cabinet LMB Avocats à Paris pour une consultation sur mesure ou une prise en charge de votre dossier. Nous serons ravis de vous apporter l’expertise nécessaire pour protéger l’intérêt de votre enfant dans les meilleures conditions.