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Que faire en cas de succession bloquée par un des héritiers ?

Le 17 septembre 2024
Que faire en cas de succession bloquée par un des héritiers ?
Pour débloquer une succession , la médiation, le partage judiciaire ou la nomination d’un mandataire successoral sont des options. Des sanctions comme des dommages et intérêts ou le recel successoral peuvent parfois s’appliquer.

Lorsqu'un des héritiers d'une succession refuse de coopérer, la situation successorale peut rapidement se retrouver rapidement paralysée. Cette obstruction peut entraîner des retards significatifs dans la liquidation et la répartition des biens, voire des tensions familiales prolongées. Dans cet article, nous allons explorer les différentes solutions légales permettant de débloquer une succession, détailler les sanctions applicables aux héritiers récalcitrants et envisager des stratégies afin de prévenir ces situations.

1. Quand considère t-on qu'une succession est bloquée ?

Une succession est dite bloquée lorsqu'un ou plusieurs héritiers s'opposent, de manière active ou passive, au déroulement des opérations de liquidation et de partage.

Ce blocage peut se manifester de différentes manières :

  • Refus de signer des documents notariés indispensables à la      liquidation des biens,
  • Désaccord sur la vente d’un bien immobilier,
  • Contestation de l’évaluation des biens,
  • Refus de participer aux réunions ou aux prises de décisions.

Le Code civil, dispose article 815 du Code Civil  que « nul ne peut être contraint de demeurer dans l’indivision ». Cela signifie qu’en principe, tout héritier peut exiger la fin de l’indivision en demandant le partage des biens. Toutefois, lorsque l’un des cohéritiers refuse de coopérer, cette demande devient difficile à exécuter sans passer par des procédures judiciaires spécifiques.

2. Causes fréquentes du blocage d'une succession

Le blocage d'une succession peut avoir diverses origines. Comprendre les raisons qui poussent un héritier à bloquer la situation est important pour trouver une solution adaptée.

2.1. Désaccord sur la répartition des biens

Certains héritiers peuvent estimer que la répartition des biens n’est pas équitable. Ce désaccord peut concerner la valeur des biens, leur répartition entre les héritiers ou encore des droits spécifiques liés à certains actifs (par exemple, un héritier souhaitant conserver un bien familial sentimental).

2.2. Refus de vendre un bien indivis

Le refus de vendre un bien indivis est un motif de blocage très fréquent. Un héritier peut s’opposer à la vente d’un bien immobilier, souvent pour des raisons émotionnelles (attachement au domicile familial, par exemple) ou parce qu'il estime que la vente n'est pas dans son intérêt financier immédiat.

2.3. Comportement négligent ou inactif

L’inaction d’un héritier peut également provoquer un blocage. Par exemple, un héritier qui refuse de répondre aux convocations, d’assister aux réunions ou de signer les actes nécessaires peut retarder indéfiniment la liquidation de la succession. Cette négligence passive peut parfois être aussi préjudiciable qu'une opposition active.

2.4. Crainte des dettes successorales

Certains héritiers peuvent refuser d’avancer dans la procédure de peur que l’acceptation de la succession entraîne pour eux des charges financières importantes, notamment des dettes du défunt. Cette crainte, souvent infondée, peut néanmoins freiner le processus.

3. Solutions juridiques pour débloquer une succession paralysée

Face à une succession bloquée, plusieurs solutions juridiques existent pour débloquer la situation. Certaines sont à privilégier avant d'entamer une action judiciaire, tandis que d'autres impliquent une intervention du tribunal.

3.1. La médiation successorale

La médiation successorale est souvent le premier recours à envisager avant de se tourner vers les tribunaux. En effet, elle permet aux héritiers de tenter de trouver un compromis à l'amiable, sous l’égide d’un médiateur neutre (souvent un notaire ou un avocat). Cette médiation est régie par les articles 131-1 et suivants du Code de procédure civile.

Le médiateur joue un rôle d’intermédiaire et aide les héritiers à résoudre leurs différends, qu’ils concernent la répartition des biens, la vente d’un actif indivis ou tout autre point de tension. La médiation présente plusieurs avantages : elle est moins coûteuse et plus rapide qu’une procédure judiciaire et elle permet de préserver les relations familiales, souvent fragiles dans ces circonstances.

3.2. Nomination d’un mandataire successoral

Lorsque la médiation échoue ou qu’un héritier continue de bloquer la succession, le tribunal peut être saisi pour désigner un mandataire successoral. L’article 813-9 du Code civil prévoit cette possibilité lorsque les héritiers ne parviennent pas à s’entendre.

Le mandataire successoral est une personne extérieure, souvent un avocat ou un notaire, nommée par le tribunal pour administrer les biens de la succession à la place des héritiers. Il est chargé de prendre les décisions nécessaires pour débloquer la situation, comme vendre des biens ou répartir les actifs, même en l’absence d’un accord total entre les héritiers.

Jurisprudence :

Cour d'appel de Paris, 5 mars 2015, n°13/24119 : Dans cette affaire, le tribunal a nommé un mandataire successoral pour administrer une succession bloquée par le refus d’un héritier de vendre un bien immobilier.


3.3. L'action en partage judiciaire

L’action en partage judiciaire est une procédure qui permet à un héritier de demander au tribunal de forcer le partage des biens lorsque les cohéritiers ne peuvent s’entendre. Conformément à l’article 840 du Code civil, tout héritier a le droit de demander le partage des biens, même en cas d’opposition des autres.

Le tribunal, après avoir étudié les arguments des parties, peut soit ordonner un partage amiable, soit forcer la vente des biens indivis, souvent par le biais d’une vente aux enchères.

Dans le cadre de cette procédure, le tribunal peut également désigner un expert judiciaire pour évaluer les biens, en particulier lorsque les héritiers contestent la valeur des actifs.

Jurisprudence :

Cour de cassation, 1ère chambre civile, 10 février 2010, n°09-10.934 : La Cour de cassation a validé le recours au partage judiciaire alors que les héritiers ne parviennaient pas à un accord amiable sur la répartition des biens.

3.4. La procédure de référé

Le référé est une procédure d'urgence qui permet d'obtenir rapidement une décision judiciaire en cas de danger immédiat (article 808 du Code de procédure civile) ou d'urgence. Par exemple, si un bien immobilier risque de se dégrader faute de soins ou d’entretien, un héritier peut demander au juge des référés de prendre des mesures provisoires pour le protéger, comme ordonner sa vente rapide afin d’éviter qu’il ne perde de la valeur.

Jurisprudence :

Cour d'appel de Paris, 23 mai 2017, n°16/06689 : Le juge des référés a ordonné la vente immédiate d’un bien immobilier en danger de dégradation.


4. Sanctions applicables aux héritiers bloquant une succession

En plus des solutions permettant de débloquer la situation, des sanctions peuvent être prises à l’encontre des héritiers récalcitrants. Ces sanctions peuvent être civiles ou, dans certains cas, pénales.

4.1. Sanctions civiles : dommages et intérêts

Un héritier qui, par son comportement négligent ou d'opposition systématique sans motif légitime , cause en général un préjudice aux autres cohéritiers peut être condamné à verser des dommages et intérêts. En vertu de l’article 1240 du Code civil, tout préjudice causé à autrui doit être réparé. Cela inclut les pertes financières liées à un blocage de succession, comme l'impossibilité de vendre un bien ou le manque à gagner lié à des retards dans la liquidation.

Il est important de souligner qu'afin d'obtenir lesdits dommages et intérêts il faudra que le comportement de l'héritier récalcitrant ou négligent soit constitutif d'une faute qualifiée et que la preuve du lien de causalité entre cette faute et le préjudices subis par les autres héritiers soient clairement démontrée.

Jurisprudence :

Cour d'appel de Paris, 12 avril 2016, n°14/23652 : Un héritier a été condamné à verser des dommages et intérêts pour avoir bloqué la vente d’un bien immobilier pendant plusieurs années, privant ainsi les autres cohéritiers de leur part d’héritage.

4.2. Recel successoral

Le recel successoral est défini à l’article 778 du Code civil. Il concerne les héritiers qui dissimulent ou détournent des biens de la succession pour en priver les autres. L’héritier coupable de recel est déchu de ses droits sur les biens dissimulés et doit les restituer à la succession.

Jurisprudence :

Cour de cassation, 1ère chambre civile, 31 janvier 2006, n°04-19.359 : Dans cette affaire, un héritier ayant dissimulé des biens de la succession a été condamné pour recel et a perdu ses droits sur les biens dissimulés.

4.3. Escroquerie (article 313-1 du Code pénal)

L'escroquerie, prévue par l’article 313-1 du Code pénal, peut s’appliquer lorsqu’un héritier utilise des manœuvres frauduleuses pour bloquer la succession ou obtenir un avantage indu. Cela pourrait être le cas si un héritier falsifie des documents ou manipule des informations pour influencer la répartition des biens.

Jurisprudence :

Cour d’appel de Paris, 8 décembre 2006 : Un héritier a été condamné pour escroquerie après avoir manipulé des documents et trompé les autres cohéritiers sur la répartition des biens.


5. Comment prévenir le blocage d'une succession ?

Afin de prévenir les situations de blocage successoraux, il est possible d’anticiper certains conflits successoraux en amont.

5.1. Donation-partage

La donation-partage (article 1075 du Code civil) permet à une personne de répartir ses biens de son vivant entre ses héritiers. Cela évite souvent des conflits après le décès, car la répartition des biens a déjà été effectuée selon la volonté du donateur.

5.2. Nommer un exécuteur testamentaire

L’exécuteur testamentaire (article 1025 du Code civil) est une personne désignée par le testateur pour veiller à la bonne exécution de ses dernières volontés. Cet exécuteur testamentaire peut intervenir pour s’assurer que la succession se déroule sans heurts et que les décisions sont prises conformément aux souhaits du défunt.

En conclusion , il est important de souligner qu'une succession bloquée par un des héritiers peut entraîner de longues procédures et des tensions familiales. Cependant, il existe des moyens juridiques efficaces pour débloquer la situation, qu’il s’agisse de la médiation, de l’intervention d’un mandataire successoral ou d’une action en justice. Les sanctions contre les héritiers récalcitrants sont également prévues, tant sur le plan civil que, dans certains cas, pénal.

Pour toute assistance au sujet d'une succession bloquée, vous pouvez contacter le cabinet LMB Avocats afin  d'obtenir des conseils adaptés à votre situation.